dimanche 29 septembre 2019

Sur les rêves (extraction)

 
C’est dans cette persistance inattendue de la mémoire que je rencontrais la première lueur de ma journée, une ombre blanche prête à me raviver pour l’éternité.
Puis, ce fût l’insistance de cette même mémoire qui me fit perdre espoir, à mon grand regret. Je ne reconnaissais plus le monde qui m’entourait, seulement un son qui me parvenait des arbres, du vent qui les traversait. Étais-je un autre ou étais-je ailleurs ? Était-ce une illusion ? 
Je ressentais la même sensation qui s’imprègne en nous au réveil après un rêve où nous étions conscients de nous-mêmes mais totalement étrangers à la situation.
Cette sensation que nous ne retrouvons qu’au réveil car c’est l’éveil qui permet de se remémorer cet état de conscience du sommeil paradoxal par le truchement du souvenir. Si nous mourions en plein sommeil nous serions incapables de (re)connaître le moi du rêve et l’état de conscience qui nous habitaient. Nous en perdrions toute trace pour l'éternité.
 
Les rêves n’existent que parce que nous sommes inscrits dans le réel de la vie et dans la vie du réel, à contrario notre vie existerait-elle sans la dimension onirique ? Les rêves sont l’instance la plus puissante de l’existence humaine, même si nous ne sommes pas conscients des bienfaits ou des maléfices que peuvent générer les rêves, des réparations qu’ils opèrent de et dans notre psychisme, de leur rémanence au cœur de notre réel et de leurs pouvoirs créateurs. Ils ne sont pas mus par notre volonté et notre rationalité mais par une force interne dont la puissance reste encore à explorer. 

Les rêves nous habitent comme nous habitons nos rêves. Ils hantent de leur présence notre conscience diurne et sont une machinerie implacable, irrépressible, vitaliste et dotée d’une volonté de puissance nietzschéenne hallucinante. 
SL